Il est tout Ă fait possible (inĂ©vitable) que je mâĂ©loigne plus ou moins du sujet, ou des sujets? mais jây reviendrai sĂ»rement de temps en temps, permettez que je batifole 
Il y a bien des endroits oĂč on peut dire que la syntropie ne marche pas : lĂ oĂč les conditions sont trop extrĂȘmes pour que quoi que ce soit puisse pousser, par exemple mettons en antarctique. Quoi que, avec une serre chauffĂ©e et en important du sol il nây a pas de raison quâon ne puisse y faire de lâagroforesterie syntropique aussi, en thĂ©orie, parce quâen pratique ce serait possible mais assez absurde.
Pourquoi la syntropie va-t-elle fonctionner nâimporte oĂč? Parce que, pour le dire Ă ma façon, la syntropie (en dehors dâĂȘtre surtout un mot) câest le comportement de la vie. Une des caractĂ©ristiques remarquables de la vie est dâaller du simple vers le complexe, dâoĂč le nom de syntropie.
Câest Ă la fois le comportement de la vie, et lâĂ©tude humaine de ce comportement. De la mĂȘme maniĂšre quâon peut dire que la physique quantique Ă©tudie le comportement des atomes et des particules, la syntropie Ă©tudie le comportement de la vie. On pourrait dire que câest une branche de la biologie, ou de lâĂ©cologie, ou dâautres biosciences, on peut aussi dire plus justement peut-ĂȘtre quâelle en intĂšgre plusieurs, enfin aprĂšs tout ce ne sont que des cases auquel la rĂ©alitĂ© du vivant Ă©chappe.
Si notre comprĂ©hension du comportement de la vie peut ĂȘtre erronĂ©e, elle lâest dâailleurs forcĂ©ment Ă un certain degrĂ©, celui-ci existe indĂ©pendamment de notre plus ou moins bonne comprĂ©hension.
LâhumanitĂ© et nos interactions avec les Ă©cosystĂšmes sont elles-mĂȘmes inclues dans la syntropie. En fait câest mĂȘme une façon de prendre une place dans les Ă©cosystĂšmes qui nous accueillent et de concourir Ă leur prospĂ©ritĂ© comme le font tous les autres ĂȘtres vivants.
Quand on parle de syntropie on veut souvent dire lâapplication de la syntropie, câest Ă dire lâagroforesterie syntropique, le potager ou maraĂźchage syntropique, voir mĂȘme lâagriculture syntropique, bien que je nâaime pas beaucoup le mot dâagriculture qui reprĂ©sente pour moi la logique inverse de la syntropie, logique quâon a largement adoptĂ©e depuis le nĂ©olithique.
Donc, Ă ce que je pense, la syntropie câest Ă la fois
- la dynamique, le comportement de la vie,
- lâĂ©tude, la connaissance quâon a de ce comportement
- lâapplication, la pratique sur la base de cette connaissance
Mais en rĂ©alitĂ© les trois ne sont pas vraiment dissociĂ©es, sans lâune ou lâautre lâensemble perdrait son sens pour nous.
VoilĂ qui est bien rationnel! Et ça lâest tout Ă fait, si lâon veut observer par lâĆil de la raison. Mais il y a aussi un autre aspect, qui nâest pas rationnel, mais en fait pas non plus irrationnel! Il dĂ©coule du fait que nous fassions partie intĂ©grante de la vie. Elle est Ă la fois autour de nous et en nous. Nous nâen sommes mĂȘme pas insĂ©parables, puisquâil nây a pas la vie et nous.
Alors en nous mettant Ă lâĂ©coute de la respiration qui anime chaque Ă©lĂ©ment des Ă©cosystĂšmes, dont nous, on peut se mettre au diapason de la vie et agir en accord avec son flot. Si si! hahaha!
On a vite fait de teinter de nos croyances notre perception du rĂ©el, et le dire ne fait jamais vraiment justice Ă lâĂȘtre mais en gros câest ça. Câest plus du domaine de lâexpĂ©rience que de la connaissance rationnelle, mais il y a connaissance aussi et en dĂ©finitive lâune nâempĂȘche pas lâautre, bien au contraire.
En pratique prenons une des dynamiques de la vie, un des « intrants » de connaissance de la syntropie, la succession Ă©cologique. Chaque organisme dâun Ă©cosystĂšme est nourri par lâĂ©cosystĂšme et y contribue. Si ce nâest pas le cas, par exemple si on largue un buffle au milieu du dĂ©sert de Gobi ou du Pacifique, le pauvre ne va pas durer longtemps. En gĂ©nĂ©ral cela nâarrive simplement pas.
Câest pour ça que pendant la pĂ©riode oĂč il nây avait sur le continent quâune pellicule de cyanobactĂ©ries sur le rocher, il nây avait pas de diplodocus. Ou alors un tout petit diplodocus. Non, je dĂ©lire, mĂȘme pas.
Câest comme une mĂ©lodie et son tempo, le diplodocus il est pas sur le tempo, hors temps. Sur la base des cyanobactĂ©ries et du peu de matiĂšre organique ont pu sâinstaller les lichens, algues, champignons, des organismes de plus en plus complexes, jusquâaux fougĂšres, etc. avec des interactions de plus en complexes aussi et ainsi de suite jusquâau diplodocus, pile sur le tempo.
La succession Ă©cologique continue incessamment, les organismes se succĂšdent, enrichissent le milieu qui les nourrit et Ă©ventuellement cĂšdent la place Ă dâautres le moment venu. Selon lĂ oĂč en est la succession Ă©cologique, on peut avoir un Ă©cosystĂšme trĂšs pauvre en vie, comme un dĂ©sert, ou trĂšs riche en vie, un systĂšme dâabondance, comme une forĂȘt tropicale mature. Mais mĂȘme dans un systĂšme dâabondance trĂšs avancĂ©, la succession Ă©cologique est encore en marche. TrĂšs loin du centre de la spirale on pourrait croire ĂȘtre sur un cercle, mais en fait non.
Du coup en agroforesterie syntropique on va regarder Ă quel stade en est lâĂ©cosystĂšme dans lequel on veut planter, quelque part entre le dĂ©sert et la forĂȘt mature. Donc par exemple sur un terrain trĂšs sableux, pauvre en matiĂšre organique, en Ă©lĂ©ments nutritifs, on va semer ou planter dans le tempo des plantes pionniĂšres qui sont adaptĂ©es Ă vivre de peu voire sont aussi capables de capter par des symbioses lâazote de lâair dans le sol. Par exemple des bouleaux, des caragana, des elaeagnus, des moringa. Mais comme la nature du sol nâest pas le seul facteur, en France on va plutĂŽt Ă©viter le moringa, qui est super, mais gĂ©lif. De la mĂȘme maniĂšre si les conditions sont vraiment trop sĂšches, ce sera trop sec pour y mettre des bouleaux. Il « suffit juste » dâĂȘtre Ă lâĂ©coute et dans le tempo, personnellement jâen suis loin mais câest lâidĂ©e. Ăa peut parfois ĂȘtre plus subtil que pas de pommier ou de buffle au milieu du dĂ©sert de Gobi 
Enfin tout ça pour dire que la vie, la syntropie ou la succession Ă©cologique marchent Ă tous les coups, elles ne ratent pas, ce qui est tout Ă fait possible par contre câest que dans nos plantations nous soyons « hors tempo ».
En agroforesterie syntropique, pour (re)co-crĂ©er des Ă©cosystĂšmes vivants, fertiles, nourriciers, accueillants on se base sur les dynamiques de la vie quâon a pu observer (et que la syntropie nâa pas inventĂ©es, ni personne quand on y pense) comme la succession Ă©cologique ou les effets des perturbations, et on essaye de rĂ©unir les conditions pour accĂ©lĂ©rer le processus. Quand lâĂ©chelle et les circonstances le permettent cela peut passer par lâapport de biomasse, dâeau, de fertilitĂ©, de mycorhizes (levain forestier, voire inoculant du commerce) histoire de donner un coup de pouce au dĂ©part. Lâessentiel restant le choix des essences et variĂ©tĂ©s, la diversitĂ©, une densitĂ© maximale et une majoritĂ© de plantes pour la perturbation (cependant rien nâempĂȘche dâen choisir des qui aient aussi des utilitĂ©s secondaires, mĂȘme comestibles).
En gĂ©nĂ©ral je suis partisan de mettre en Ćuvre tout ce quâon peut tant que les coĂ»ts (Ă©cologique, en temps, en argent, en efforts) restent raisonnables. Il faut veiller toutefois Ă ne pas avoir la main trop lourde du cĂŽtĂ© des intrants pour ne pas crĂ©er de chocs importants. Comme de mettre dâun coup 20 cm de broyat de bois sur un sol trop pauvre pour le digĂ©rer (câest le sujet de la video avec GĂ©rard Ducerf et cie).
Faire un tel apport câest si on veut ĂȘtre hors tempo dans la succession Ă©cologique, pas en termes de plantes mais en termes de matiĂšre. 20 cm de broyat de bois ou autres Ă©corces Ă©talĂ©s dans une forĂȘt bien vivante, humide et pleine de champignons, ce serait bien moins problĂ©matique et assez vite digĂ©rĂ© par la vie du sol. Pas forcĂ©ment un cadeau pour la biodiversitĂ©, mais câest une autre histoire.
Câest plus un feeling mais je pense quâĂ part Ă©ventuellement 20 cm de terre, je suis pas sĂ»r quâun apport de 20 cm dâune seule matiĂšre quelle quâelle soit soit une action judicieuse. Mieux vaut je pense un mĂ©lange comme tu fait David, bois, tonte, feuilles, câest parfait, tant que le C/N reste potable il nây a pas de limite Ă la diversitĂ© de ce quâon peut mettre, plus il y a de diversitĂ©, plus y en aura pour tous les goĂ»ts, tous les organismes. Diversifier câest aussi se donner moins de chances de se tromper en mettant trop de ceci ou cela.
Pour un apport dâune matiĂšre unique peut-ĂȘtre si le rapport carbone sur azote est pile ce quâil faut au sol et que le sol est bien vivant⊠pourquoi pas, mais si le sol est bien vivant, a tâil besoin dâun apport massif? autant y faire pousser directement la biomasse qui va le nourrir, ce Ă moindres coĂ»ts de toutes sortes. De lâagroforesterie syntropique en somme!
Pas de risque dâindigestion du sol si tout ce quâil a Ă digĂ©rer pousse sur place. Si il est assez vivant pour faire pousser une plante, il est assez vivant pour en digĂ©rer la biomasse. Bon rien nâĂ©taye ce que je dis lĂ mais câest pas grave. Une mĂ©taphore peut-ĂȘtre : ce quâon est capable de boire, on est capable de le pisser. Attention lâinverse nâest pas forcĂ©ment vrai!!! haha
Ce dont il sâagit dans la vidĂ©o câest quand il y a une disproportion entre lâapport carbonĂ© et la capacitĂ© du sol Ă lâassimiler, en lâoccurrence des bouettes et des brouettes de semi-remorques Ă lâhectare! Loin de ce qui aurait pu tranquillement pousser sur le sol lui mĂȘme. Dâailleurs câĂ©tait surtout des personnes de MSV qui avaient ces pratiques Ă©lĂ©phantesques et ils ne le font plus dans ces proportions.
Je ne pense pas que la syntropie soit compliquée, plutÎt comme la vie complexe et simple à la fois. « Simplexité » comme dit Anaëlle!
AprÚs « Bienvenue en syntropie » je te conseille chaudement « La vie en syntropie » de Dayana Andrade et Felipe Pasini, les deux livres sont complémentaires.